Tunisie

ONU : Les peines dans l’affaire de « complot » en Tunisie représentent un recul pour la justice et l’État de droit

L’ONU a dénoncé, jeudi dernier, les peines prononcées à l’encontre des accusés dans l’affaire de « complot contre la sécurité de l’État » en Tunisie, les qualifiant de « recul pour la justice et l’État de droit ».

Cela a été exprimé dans une déclaration faite par le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Turk, relayée par le Haut-Commissariat sur son site web.

Volker Turk a exprimé son inquiétude, déclarant : « Les peines sévères et longues prononcées à l’encontre de 37 personnes en Tunisie, dans ce que l’on appelle l’affaire de complot, constituent un recul dans le domaine de la justice et de l’État de droit. »

Le samedi précédent, la chambre pénale spécialisée dans les affaires de terrorisme du tribunal de première instance de Tunis a rendu des verdicts préliminaires de peines de prison allant de 4 à 66 ans à l’encontre de 37 accusés dans cette affaire, dont 22 en présence et 15 par défaut.

Les autorités tunisiennes ont précisé que les personnes mises en détention dans cette affaire étaient jugées pour des crimes tels que « complot contre la sécurité de l’État » ou « corruption », tout en niant l’existence de détenus pour des raisons politiques. Cependant, elles n’ont pas réagi aux critiques du responsable onusien concernant les procédures judiciaires suivies.

Volker Turk a ajouté que « le procès a été entaché de violations des droits à un procès équitable, soulevant ainsi des préoccupations sérieuses concernant des motivations politiques ». Il a précisé que « le procès a manqué de transparence, les preuves n’ayant pas été présentées publiquement ni soumises à un examen contradictoire. De plus, un certain nombre de journalistes, de représentants de la société civile et de diplomates ont été empêchés d’assister aux audiences publiques. Avant la prononciation des peines, les accusés présents n’ont pas eu la possibilité de s’exprimer, et leurs avocats n’ont pas eu suffisamment de temps pour présenter leurs plaidoiries ».

Il a appelé à « garantir que tous les accusés bénéficient pleinement de leurs droits à une procédure légale et à un procès équitable lors du processus d’appel, et a ajouté : « Les charges doivent être abandonnées si aucune preuve suffisante n’est présentée concernant des actes illégaux ».

Il a conclu en soulignant que « la Tunisie a été un modèle et une source d’inspiration pour de nombreux pays de la région après sa transition politique en 2011, et j’espère qu’elle reviendra sur la voie de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme ».

L’affaire remonte à février 2023, lorsqu’un groupe de « politiciens » d’opposition, d’avocats, de militants de la société civile et d’hommes d’affaires a été arrêté, et leur a été imputée des accusations telles que « tentative de nuire à l’ordre public et de compromettre la sécurité de l’État », « espionnage au profit de puissances étrangères » et « incitation à la violence ou à la rébellion ».

Des opposants et des organisations de défense des droits humains affirment que cette affaire a un « caractère politique » et qu’elle est utilisée pour « éliminer les opposants politiques et faire taire les voix critiques à l’égard du président (Kaïs) Saïed, en particulier ceux qui s’opposent à ses mesures exceptionnelles ».

Le 25 juillet 2021, Saïed a imposé des mesures exceptionnelles, incluant la dissolution des conseils judiciaire et parlementaire, l’émission de législations par décrets présidentiels, l’adoption d’une nouvelle constitution via référendum, et l’organisation d’élections législatives anticipées.

Certaines forces politiques tunisiennes considèrent ces mesures comme un « coup d’État contre la constitution et l’instauration d’un pouvoir absolu », tandis que d’autres les voient comme « une correction du chemin de la Révolution de 2011 », qui a renversé le président Zine El Abidine Ben Ali.

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